En République Démocratique du Congo (RDC), la coalition Alliance Fleuve Congo (AFC), dont le principal membre est le mouvement rebelle M23, a annoncé, ce lundi 3 février, la mise en place d’un cessez-le-feu unilatéral pour des raisons humanitaires. Cette décision, rendue publique via un communiqué diffusé sur le réseau social X, intervient après une semaine de combats intenses entre les rebelles et les forces armées congolaises (FARDC) dans la ville de Goma et ses environs.
Un cessez-le-feu unilatéral et sans concertation
L’annonce de cette trêve intervient alors que l’offensive conjointe du M23 et de l’armée rwandaise dans l’est de la RDC a provoqué une recrudescence des violences et une crise humanitaire majeure. Toutefois, ce cessez-le-feu a été décrété sans discussions avec le gouvernement congolais, qui refuse toute négociation avec le M23, qualifié de « mouvement terroriste » par Kinshasa.
Aurélie Bazzara-Kibangula, correspondante de France 24, souligne que la durée de la trêve n’a pas été précisée, ce qui laisse planer le doute sur la sincérité et la viabilité de cette annonce. Selon elle, « le communiqué affirme que l’AFC et le M23 ont décidé ce cessez-le-feu pour des raisons humanitaires. Il faut rappeler qu’à Goma, les besoins sont énormes. De nombreux entrepôts d’organisations humanitaires ont été pillés et le ravitaillement n’a pas pu encore être fait. Ce cessez-le-feu, s’il est respecté, pourra donc faciliter l’acheminement d’aide humanitaire par route ».
Des ambitions territoriales toujours floues
Dans le même communiqué, l’AFC et le M23 ont également affirmé qu’ils n’avaient « aucune intention de prendre le contrôle de Bukavu ou d’autres localités ». Une déclaration qui a suscité la surprise à Kinshasa, où les autorités craignent un élargissement du conflit vers le Sud-Kivu.
« Depuis quelques jours, la capitale provinciale du Sud-Kivu semblait menacée. Des troupes rwandaises et du M23 ont été signalées sur l’axe menant à Bukavu, selon plusieurs sources sécuritaires », précise la journaliste. En réponse à ces menaces, les autorités provinciales avaient d’ailleurs lancé une campagne de recrutement de volontaires prêts à défendre la ville contre toute incursion rebelle.
Cependant, de nombreux observateurs restent sceptiques quant à la crédibilité de cette annonce, rappelant que plusieurs cessez-le-feu ont déjà été proclamés dans le cadre des processus de paix, mais n’ont jamais été respectés sur le terrain.
Une escalade diplomatique en parallèle
Alors que la situation sécuritaire demeure extrêmement tendue, les regards se tournent désormais vers le sommet extraordinaire conjoint de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC) et de la Communauté des États d’Afrique de l’Est (EAC), prévu ce samedi à Dar es Salaam, en Tanzanie. Ce sommet vise à trouver une solution régionale à la crise qui menace la stabilité de toute la région des Grands Lacs.
La présidence kényane a confirmé la participation des présidents congolais Félix Tshisekedi et rwandais Paul Kagame à cette rencontre diplomatique d’envergure. Toutefois, si Kigali a officiellement annoncé la présence de Paul Kagame, Kinshasa n’a pas encore confirmé celle du chef d’État congolais.
Sur fond de tensions grandissantes, les 16 pays membres de la SADC avaient déjà exprimé vendredi dernier leur souhait d’organiser une réunion d’urgence avec les huit États membres de l’EAC, dont le Rwanda fait partie. La tenue de ce sommet illustre l’inquiétude croissante des États voisins quant à un possible embrasement régional du conflit congolais.
Vers une désescalade ou une nouvelle impasse ?
Alors que la RDC exige des sanctions internationales contre le Rwanda et promet « une riposte vigoureuse » à l’avancée des rebelles, la situation demeure incertaine. L’annonce de ce cessez-le-feu unilatéral du M23 et de l’AFC est perçue par certains comme une manœuvre stratégique visant à gagner du temps ou à renforcer leur position avant d’éventuelles négociations. D’autres y voient une opportunité, certes fragile, d’améliorer temporairement la situation humanitaire dans l’est du pays.
Les prochains jours seront déterminants pour évaluer si cette trêve sera effectivement respectée et si le sommet régional de Dar es Salaam pourra aboutir à des avancées concrètes vers un retour à la paix dans la région. Dans l’attente, la population congolaise continue de subir les conséquences d’un conflit qui, malgré les nombreuses initiatives diplomatiques, ne semble toujours pas près de trouver une issue durable.
